Omerta sur la réserve parlementaire de 2012
Source : LePoint.fr
Où sont passés les millions de la réserve parlementaire de 2012 ? Sommé par la justice de fournir la liste des bénéficiaires de la précieuse cagnotte, Bercy botte en touche. Deux ans après le vote de la loi sur la transparence de la vie publique, la caisse secrète de la République n’a pas encore dévoilé tous ses mystères.
Longtemps gérée dans les arcanes du pouvoir, la réserve parlementaire est rendue publique depuis 2014. Libre désormais à chaque citoyen de consulter la répartition de cette enveloppe garnie de 150 millions d’euros que les députés et les sénateurs distribuent à des associations ou collectivités locales de leur fief électoral. Mais cette transparence a ses limites. Si les listings de 2013 et 2014 ont été publiés, ceux des années précédentes ne sont pas connus dans leur intégralité.
Un trou de plus de 60 millions d’euros
C’est le cas de 2011 et 2012, où seules les subventions aux collectivités territoriales ont été rendues publiques. Les sommes versées aux associations restent, en revanche, totalement inconnues. Or il ne s’agit pas de quelques euros, mais d’un magot estimé à plus de 60 millions d’euros. De quoi faire naître des soupçons renforcés par l’élection présidentielle qui se tenait cette année-là.
« Un comble », pour Hervé Lebreton, président de l’Association pour une démocratie directe. Ce fervent militant pour la transparence de la vie publique, à l’origine des premières révélations sur la réserve parlementaire, réclame depuis avril 2013 la communication de toutes les subventions distribuées en 2012. Un jugement du tribunal administratif de Paris, rendu le 21 janvier 2015, lui a même donné raison. Les juges avaient alors accordé deux mois au ministère du Budget pour rendre publics tous les documents réclamés par l’association d’Hervé Lebreton. Un mois après l’expiration de ce délai, Bercy continue à faire la sourde oreille.
Des « dossiers hautement sensibles »
Interrogés par Le Point.fr, les collaborateurs du ministre du Budget Christian Eckert plaident « le manque de moyens techniques pour rassembler les données demandées ». Bercy manquerait donc de fonctionnaires pour se consacrer pleinement à la tâche. Une excuse qu’Hervé Lebreton refuse d’entendre. Pour lui, le gouvernement veut en réalité « noyer le poisson ». Le militant soupçonne le ministère de vouloir dissimuler des « dossiers hautement sensibles ». La part de la réserve allouée aux associations est en effet réputée pour être éminemment politique.
En 2013, des élus de gauche comme de droite s’en sont servis pour arroser les syndicats étudiants. L’Unef, connue pour sa proximité avec le Parti socialiste, a encaissé 90 000 euros, et l’Uni, proche de l’UMP, a touché 70 000 euros…
Mais ces sommes restent dérisoires à côté des « subventions » versées aux think tanks. Ces laboratoires d’idées affiliés aux partis politiques se sont partagé 1 300 000 euros. Mieux que la loterie.