Subventions Ryanair : Air France porte plainte
Ryanair va devenir cette année le premier transporteur européen. Avec 65 millions de passagers, Ryanair va passer devant Air France et Lufthansa. Ce succès repose essentiellement sur le recours massif aux subventions et aides ( illégales ?) provenant des aéroports desservis.
Selon Air France, ces aides et subventions s’ élèvent à 660 millions d’euros en Europe en 2008, dont 35 millions d’euros de subventions en France. Air France a décidé de porter l’affaire devant la Commission européenne fin 2009 et de porter plainte. La plainte recouvre plusieurs chefs d’accusation : «défaut de notification préalable», «rupture d’égalité et distorsion de concurrence», «illégalité d’aides d’État».
Air France a mené une véritable enquête avant d’agir ainsi. Elle a notamment décrypté tous les rapports des chambres régionales des comptes (CRC) sur le sujet. À partir de données parfois anciennes, croisées avec ses informations sur le terrain, ses experts ont reconstitué le puzzle des aides supposées illégales perçues par Ryanair. Il en ressort qu’en moyenne, les chambres de commerce et d’industrie, qui gèrent les aéroports, soutiennent l’activité de Ryanair en France à hauteur de 9 à 32 euros par passager embarqué.
En partant du bas de la fourchette constatée en France (une aide de 11 euros par passager) et en faisant une simple règle de trois avec l’activité européenne de Ryanair (60 millions de passagers en 2008), Air France estime que sa concurrente a perçu cette année-là 660 millions d’euros d’aides en Europe. Pour étayer son enquête, la compagnie française s’est appuyée sur ses partenaires KLM et Alitalia. Elle a ainsi pu constater que les aides accordées à Ryanair sur les aéroports d’Ostende et Alghero étaient supérieures à son hypothèse basse de 11 euros.
Air France calcule que Ryanair, qui a affiché un résultat net de 390 millions pour son exercice 2007-2008 et une perte de 169 millions en 2008-2009, a en fait virtuellement perdu 270 millions en 2008 et 829 millions l’an dernier.
Ces aides prennent plusieurs formes. Elles peuvent être directes, sous forme d’aides au démarrage se prolongeant en contradiction avec la législation européenne. Il s’agit aussi d’aides «indirectes», sous forme de ristourne consentie sur l’assistance aux escales et les redevances aéroportuaires.
La méthode Ryanair est connue : pour obtenir des aides en échange de la desserte d’un aéroport peu rentable, la compagnie met en avant la manne financière des touristes anglo-saxons qu’elle transporte. En cas de refus, ou si les aides sont dénoncées, elle choisit un aéroport tout proche.
Cette croisade d’Air France n’est pas le nouvel épisode d’un combat commercial, puisque Ryanair lui fait rarement frontalement concurrence. Elle est davantage culturelle. «Les prix pratiqués par Ryanair donnent une fausse perception de la valeur de notre service aux voyageurs, estime un cadre d’Air France. La compagnie irlandaise passe pour le mousquetaire qui vient proposer des prix imbattables face aux compagnies nationales et mettre fin à des tarifs anormalement élevés. Dans les faits, Ryanair vole avec l’argent du contribuable européen.»
source: le Figaro