Le PS marseillais soupçonné d’association de bienfaiteurs
Huit personnes mises en examen, dont quatre dorment depuis peu aux Baumettes. L’enquête du juge marseillais Franck Landou, lancée, en mars, après un ~ signalement » de la cellule antiblanchiment Tracfin, commence à donner des sueurs froides à certains élus et fonctionnaires du Conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d’Azur (Paca).
Présidée par le socialiste Michel Vauzelle, l’assemblée a reçu, voilà quelques mois, la visite de la PJ, qui a retourné à la fourche les bureaux de la politique de la ville. Motif: ce noble service, censé agir dans les zones défavorisées de toute la Provence, a un peu trop œuvré dans certains fiefs socialistes de Marseille, à commencer pal: les quartiers nord des XIIIe et XIVe arrondissements. Et de manière pas très réglo.
Départs précipités
Sur le papier, des dizaines d’associations, goinfrées de subventions, menaient de belles actions. Mais, sur le terrain, il ne se passait rien. De simples boites aux lettres recueillaient bien la monnaie. Selon « La Provence » et Rue89, quatre associations bidons ont à elles seules empoché plus de 700 000 euros entre 2005 et 2007. Et pas la queue d’une action en faveur des quartiers.
Problème: les vedettes de l’affaire ne sont pas des inconnus au PS. Au cœur de l’enquête, le dénommé Roland Balalas, fiston de Théodore Balalas, responsable des adhésions à la puissante fédération PS des Bouches-du-Rhône. Ce jeune cadre dynamique instruisait les dossiers de subventions à la Région. Collaborateur du groupe PS, il secondait l’élue chargée de la politique de la ville, Sylvie Andrieux. Laquelle est également députée des XIIIe et XIVe arrondissements.
Après la descente des poulets dans son bureau, ce militant dévoué a été suspendu par Vauzelle, le patron de la Région. Depuis, il se barricade chez lui et fuit la presse. Quant à sa chef de service, Corinne Alenda-Copitet, elle a quitté son poste dernièrement… Sûrement un coup de fatigue.
Deux autres amis, écroués, ceux-là, embarrassent le PS. Benyoub Same et Abderrazac Zeroual, figures des quartiers Nord, sont accusés d’avoir créé plusieurs des associations fantômes visées par l’enquête. Or ces défenseurs de la cause associative faisaient aussi, si l’on en croit les militants politiques de tous bords, les campagnes législatives de Sylvie Andrieux dans leurs cités. L’intéressée assure pourtant au « Canard » «connaître à peine » ces fidèles soutiens.
Arrosage électoral
Mais le magistrat instructeur s’intéresse également aux XVe etXVIe arrondissements de Marseille, dirigés par la sénatrice-maire PS Samia Ghali, protégée de Jean-Noël Guérini et ex-conseillère régionale déléguée à la vie associative à l’époque des faits. Sarnia Ghali le jure: « Les dossiers concernés ne dépendaient ni de mon secteur ni de mes délégations … »
De son côté, le président Vauzelle a martelé, le 5 février, en assemblée plénière, que la Région s’était portée partie civile en décembre dernier. Traduction : l’institution est victime d’une odieuse escroquerie avec l’aide de quelques brebis galeuses au sein de ses services.
Mais, sur la Canebière, certains élus racontent une tout autre histoire. Le juge Landou serait en train de mettre le nez dans ce drôle de système électoraliste que dénonçait, il n’y a pas bien longtemps, une ex-vedette du PS.
A la veille des régionales de 2004, Philippe Sanmarco, ancien député, en rupture du parti, avait mangé le morceau lors d’une conférence fort peu appréciée. Le thème: « Le clientélisme, comment ça marche? »
Liste d’associations douteuses à l’appui, il racontait comment la Région Paca inonde certains quartiers de Marseille: «Cet arrosage, c’est ce qu’on appelle pudiquement, au Conseil régional, les dossiers «réservés » (ou « signalés »). Qu’est-ce que ça veut dire? Ça veut dire qu’un élu (ou son groupe) en prend la responsabilité, et qu’il s’en occupe tout seul. Le dossier ne fait plus l’objet d’instruction . »
Jusqu’au jour où débarque un juge d’instruction …
Source : Le Canard enchaîné du 11 février 2009