Le 19/06/2009

Hénin-Beaumont : la culture paie cher les nettoyages de moquette

«J’étais bleu en voyant la somme», confie David Verkempinck, le directeur de l’Escapade, salle de spectacles à Hénin-Beaumont. La PJ de Lille venait de lui montrer une facture de nettoyage de sols et de moquette à 34 000 euros pour sa salle et le cinéma art et essai, en veille depuis des années. «A l’Escapade, […]

«J’étais bleu en voyant la somme», confie David Verkempinck, le directeur de l’Escapade, à Hénin-Beaumont. La de Lille venait de lui montrer une facture de nettoyage de sols et de moquette à 34 000 euros pour sa salle et le cinéma art et essai, en veille depuis des années. «A l’Escapade, il y en a en tout trois ou quatre paillassons. Mais bon, je ne sais pas si ce qu’on m’a présenté est une vraie facture, une fausse facture, ou une facture gonflée.»

henin-beaumont-lille-ville-subventions-subvention-associationUne facture que la PJ de Lille considère comme un classique de surfacturation, et qu’elle n’a pas fait entrer dans le cadre de l’instruction en cours à Hénin-Beaumont. Car la ville vit des désastres répétitifs : après un de la cour régionale des accablant, Gérard Dalongeville, le maire, est en prison, mis en examen pour détournement de . Il avait été élu sur une liste Union de la gauche, pour contrer Marine Le Pen et le Front national. Ce que sait David Verkempinck, c’est que son lieu, 11 salariés, est en procédure de redressement judiciaire, car la mairie d’Hénin-Beaumont, archi-endettée, ne lui a pas versé les subventions attendues. Soit un trou de 153 000 euros dans la caisse. Alors, les nettoyages de moquette, ça passe mal. Interview.

Depuis quand connaissez-vous des difficultés ?

Nous sommes en tension depuis 18 mois. En novembre , le de la structure était à l’équilibre. Il faut savoir que la ville est le moteur économique principal, avec un apport de 680 000 euros, ce qui représente 60% des recettes. En mars 2008, nous apprenons que nous aurons 85 000 euros en moins, sur un budget déjà consommé. Notre saison va de septembre à juin, en mars, nous avions donc déjà réalisé la plus grosse partie de cette saison. C’est la première étape, le premier delta négatif de 85 000 euros.

Et ensuite ?
En juillet 2008, je suis convoqué par le directeur général adjoint des services de la mairie, il m’apprend qu’on aura 100 000 euros de moins sur notre . 185 000 euros de déficit, c’est insurmontable sur notre budget. Je lui réponds, cela, je ne l’entends pas, il faut me le mettre par écrit. Ce qu’il n’a jamais fait. La raison fondamentale de ces baisses, c’est la cour régionale des comptes avait déjà préconisé des économies importantes, sinon, on allait vers une nouvelle des impôts.

Qu’avez-vous décidé, avec votre conseil d’administration ?
Economiquement, les carottes sont cuites. Nous avons engagé une procédure de redressement judiciaire, pour geler nos dettes.

Est-ce que vos difficultés financières sont liées à l’affaire judiciaire en cours ?

J’ai été convoqué par le SRPJ de Lille, qui m’a interrogé sur nos difficultés financières, et m’a montré aussi des factures tirées des comptes municipaux, pour vérifier leur réalité. C’est comme cela que j’ai vu une facture de nettoyage de sols et de moquette de 34 000 euros pour l’Escapade et le cinéma art et essai. Alors qu’à l’Escapade, il y a en tout trois ou quatre paillassons. La prestation datait de l’été, j’ai appelé la personne qui avait ouvert la porte à l’ de nettoyage. Le plus drôle, c’est qu’elle m’a dit, je comprends pas ce qu’ils ont fait, j’avais tout nettoyé de fond en comble la veille. Le SRPJ a totalement mis hors de cause la salle. [Ce que confirment les enquêteurs].
Nous sommes une association, et nous avons un commissaire aux comptes qui vérifie tout. Je peux vous dire que cette année, il y a passé plus de temps que d’habitude. Nous sommes une victime collatérale de la municipale, mais nous faisons nous-mêmes d’autres victimes collatérales, nos créanciers. Nous avons 153 000 euros de factures impayées.

Et quelle conséquence pour la vie de votre lieu ?
J’ai réduit la voilure : de septembre à décembre 2008, j’ai enlevé 50% de la programmation. Mais il était hors de question pour moi de tout arrêter. Je peux imaginer une friche industrielle que les artistes peuvent faire revivre, j’ai du mal avec l’idée de friche culturelle. Même si l’Escapade est un navire avec une forte d’inertie : il y a beaucoup d’ateliers, de théâtre, de musique, des locaux de répétitions. Le lieu peut continuer à vivre même si je ne programme plus rien.

Pour vous, c’est un gâchis ?
L’ Escapade a quarante ans. Elle a été la première maison de la et de la du département, au temps de Malraux. Hénin-Beaumont a été une ville-pilote, elle était dotée de tous les équipements culturels, qui embrassaient tout le champ des pratiques. Une médiathèque sur trois étages, une école de musique, une école d’arts plastiques, un centre d’art contemporain, un cinéma art et essai… On a fait vivre une utopie, ici. Aujourd’hui, tout est en abandon, pour ne pas dire en déliquescence. L’Escapade a été la matrice de tous les autres endroits, elle porte donc une forte valeur symbolique.

Etes-vous soutenu par les , alors que de nouvelles élections municipales se tiennent à la fin du mois ?
En mars, le a voté une subvention de 395 00 euros pour l’Escapade. Elle a été divisée par deux. Maintenant, est-ce que ces 395 000 euros seront payés en totalité ? Nous le verrons en juillet, après les élections.

Le Front national, avec Marine Le Pen et Steeve Briois, espère cette fois gagner la mairie. Quelles en seraient les conséquences ?
Marine Le Pen, pendant la campagne des municipales en 2008, avait dit pendant un débat télévisé, qu’elle ferait de l’Escapade un cabaret.

source: www.libelille.fr

Publié par Rédaction le 19/06/09

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